Ce que l'on sait de l'arrêt de la Cour suprême d'Israël sur le projet de réforme judiciaire de M. Netanyahou
La Cour a statué, par huit voix contre sept, qu'un amendement gouvernemental à la loi dite du caractère raisonnable ne devait pas être maintenu. Le projet de loi avait retiré à la Cour suprême le pouvoir de déclarer déraisonnables les décisions du gouvernement et constituait le premier élément majeur d'un effort sur plusieurs fronts visant à affaiblir le système judiciaire et adopté par la Knesset, le parlement israélien, l'année dernière.
La réforme judiciaire de M. Netanyahou a suscité des mois de protestations furieuses en Israël, les citoyens accusant son gouvernement de tenter d'affaiblir la démocratie israélienne.
L'arrêt sans précédent de la Cour suprême pourrait provoquer des divisions au sein du cabinet de guerre israélien, composé de M. Netanyahu et de deux éminents détracteurs de ses efforts de réforme de la Cour, alors que le conflit à Gaza fait rage.
Voici ce que nous savons de l'arrêt et de ses effets.
Qu'est-ce que la loi sur le caractère raisonnable ?
La Knesset, le parlement israélien, a adopté en juillet la loi sur le caractère raisonnable, qui prive la Cour suprême du pouvoir de déclarer déraisonnables les décisions du gouvernement.
La doctrine du caractère raisonnable n'est pas propre au système judiciaire israélien. Ce principe est utilisé dans un certain nombre de pays, dont le Royaume-Uni, le Canada et l'Australie.
Il est couramment utilisé par les tribunaux de ces pays pour déterminer la constitutionnalité ou la légalité d'une législation donnée et permet aux juges de s'assurer que les décisions prises par les fonctionnaires sont "raisonnables".
Cette norme a été utilisée cette année lorsque M. Netanyahu a démis son principal allié, Aryeh Deri, de tous ses postes ministériels, conformément à une décision de la Haute Cour israélienne selon laquelle il était déraisonnable de le nommer à des postes au sein du gouvernement en raison de ses condamnations pénales et parce qu'il avait déclaré l'année dernière devant un tribunal qu'il se retirerait de la vie publique.
M. Netanyahu a déclaré à M. Deri qu'il s'était conformé à l'arrêt "le cœur lourd, avec une grande tristesse".
Le projet de loi sur le caractère raisonnable faisait partie d'un ensemble plus large de réformes du système judiciaire israélien. D'autres parties visaient à donner au gouvernement de coalition de la droite dure plus de contrôle sur la nomination des juges et à retirer les conseillers juridiques indépendants des ministères.
Quel est l'arrêt de la Cour suprême ?
La Cour a décidé qu'un amendement gouvernemental à la loi sur le caractère raisonnable ne devait pas être maintenu. La Cour a déclaré qu'elle rejetait l'amendement parce qu'il porterait "un coup sévère et sans précédent aux caractéristiques fondamentales de l'État d'Israël en tant qu'État démocratique".
Le projet de loi du gouvernement modifiait l'une des lois fondamentales d'Israël qui, en l'absence d'une constitution officielle, font office de constitution informelle. Jusqu'à la décision de lundi, la Cour suprême n'avait jamais annulé une loi fondamentale ou un amendement à une loi fondamentale.
Dans son arrêt, 12 des 15 juges ont reconnu que la Cour avait le pouvoir d'annuler une loi fondamentale dans des "cas extrêmes". Seuls huit des douze juges ont estimé qu'il s'agissait d'un cas extrême.
Quelles ont été les réactions ?
Les alliés de M. Netanyahu ont critiqué la décision de la Cour lundi. Le ministre de la sécurité nationale, Itamar Ben-Gvir, a qualifié la décision d'"illégale", affirmant qu'elle portait préjudice aux forces israéliennes combattant à Gaza.
"Il s'agit d'un événement dangereux et antidémocratique et, à l'heure actuelle, d'une décision qui nuit à l'effort de guerre d'Israël contre ses ennemis", a déclaré M. Ben-Gvir.
Le ministre de la justice, Yariv Levin, architecte des plans de réforme judiciaire, a qualifié cette décision de "contraire à l'esprit d'unité nécessaire ces jours-ci pour assurer le succès de nos combattants sur le front". Le Likoud, le parti du premier ministre israélien, a déclaré que cette décision était "malheureuse" car elle "va à l'encontre de la volonté d'unité du peuple, en particulier en temps de guerre".
Le président de la Knesset, Amir Ohana, a ajouté qu'"en temps de guerre, ce n'est certainement pas le moment d'établir un premier précédent de ce genre dans l'histoire du pays".
La Cour suprême devait toutefois rendre son arrêt avant le 12 janvier, étant donné que deux juges saisis de l'affaire ont pris leur retraite et sont tenus par la loi de rendre leur décision finale dans les trois mois suivant leur départ.
Le chef de l'opposition, Yair Lapid, a déclaré dans un message sur X que la Cour suprême avait tout son soutien car elle avait "fidèlement rempli son rôle de protection des citoyens d'Israël".
"Si le gouvernement israélien recommence à se quereller au sujet de la Cour suprême, il n'a rien appris", a-t-il déclaré. "Ils n'ont rien appris le 7 octobre, ils n'ont rien appris des 87 jours de guerre pour notre maison.
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Source: edition.cnn.com