Israël commet-il un génocide dans la bande de Gaza ?
Depuis le début de la guerre de Gaza, l'affirmation selon laquelle Israël commet un génocide contre les Palestiniens persiste. Mais qu'en est-il de cette accusation ? L'évaluation des experts juridiques est claire - notamment en ce qui concerne les massacres du Hamas.
Les manifestants pro-palestiniens du monde entier accusent Israël de commettre un génocide dans la bande de Gaza. "C'est un génocide", peut-on lire sur d'innombrables affiches et banderoles, sous une forme ou une autre. Une accusation grave qui n'est pas seulement portée dans la rue. La section internationale de Fridays for Future, le président turc Recep Tayyip Erdogan ou des membres du cabinet en Espagne, de manière isolée également des ONG - tous ont en commun l'accusation de génocide contre Israël.
Aucune infraction du droit international public n'est plus grave. Sous l'influence de l'Holocauste, les Nations unies ont adopté en 1948 une convention qui punit le génocide ou l'équivalent. Cela présuppose l'intention de "détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux" - c'est ce que dit le droit pénal international. Le délit présuppose donc deux éléments : l'acte proprement dit et le motif qui le sous-tend.
Mais cela s'applique-t-il à la conduite de la guerre d'Israël à Gaza ? L'armée israélienne y a jusqu'à présent attaqué 14.000 cibles, selon ses propres indications. Les autorités sanitaires de Gaza, contrôlées par le Hamas, font état de plus de 10.000 morts. Mais c'est l'attaque terroriste du Hamas du 7 octobre, au cours de laquelle environ 1400 personnes ont été assassinées et des centaines d'autres enlevées, qui a déclenché la guerre.
"Ce qui est décisif, c'est l'intention de détruire"
"Rien n'indique qu'Israël commet un génocide", affirme l'expert en droit international Stefan Talmon dans un entretien avec ntv.de. Il ne fait aucun doute que des civils meurent dans la bande de Gaza. "Mais ce qui est décisif, c'est l'intention de destruction - et le droit international y met des obstacles très élevés", explique le professeur de droit international public à l'université de Bonn.
Pour la bande de Gaza, Talmon l'explique ainsi : des membres d'un groupe - les Palestiniens - sont certes tués par Israël. Dans le cas de bombardements sur un territoire habité par de nombreux civils, cela pourrait même être intentionnel. Mais pour parler de génocide, il faudrait que ces assassinats soient motivés par la seule intention d'exterminer tout ou partie des Palestiniens. "Je ne vois pas cela ici, loin de là", dit Talmon.
D'une part, Israël a le droit d'utiliser la force dans le cadre de la légitime défense. D'autre part, l'objectif déclaré du gouvernement israélien est de détruire le Hamas en tant qu'organisation terroriste et non le peuple palestinien. Certains hommes politiques du pays ont toutefois recours à une rhétorique nettement plus radicale. Dernièrement, le ministre israélien du Patrimoine, Amihai Eliyahu, a fait sensation en qualifiant le largage d'une bombe atomique sur Gaza d'"option".
N'y a-t-il pas là une intention claire de destruction ? "Tout dépend du contexte", répond Talmon. Selon lui, un chef de gouvernement qui définit la ligne officielle du gouvernement peut, dans certaines circonstances, faire des déclarations contraignantes au regard du droit international. "Mais si un ministre de la culture ou de l'éducation dit quelque chose de ce genre, cela n'est pas pertinent du point de vue du droit international". De fait, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu s'est distancié de cette déclaration et a suspendu provisoirement le ministre.
Crimes de guerre ne sont pas synonymes de génocide
Talmon souligne en outre la distinction entre un génocide et des crimes de guerre. "Le blocus de la bande de Gaza est contraire au droit international. Et même dans le cas du largage de bombes isolées, je vois des indices qui laissent penser à des crimes de guerre". Mais si l'on ne prenait comme critère que les civils morts ou les crimes de guerre, toute guerre serait un génocide - et la notion serait ainsi vidée de son sens.
Wolff Heintschel von Heinegg, spécialiste du droit international, arrive à une conclusion similaire. "On peut être critique envers le gouvernement israélien à bien des égards. Mais parler ici de génocide va bien au-delà de ce qui se passe là-bas", dit-il à ntv.de. Selon lui, on a tendance à faire de la politique avec des termes juridiques. "L'accusation de génocide est alors dans l'air. Il n'est pas si facile de l'effacer".
Un génocide doit en fin de compte être constaté par les tribunaux. Mais si l'on applique les critères à la guerre de Gaza, l'accusation ne s'applique selon Talmon qu'à une seule partie : le Hamas. Dans sa charte de 1988, le groupe terroriste formule l'objectif de rayer l'État d'Israël de la carte. Cette intention de destruction du Hamas apparaît clairement dans les massacres du 7 octobre, selon Talmon. "Si je tue sans distinction toute personne juive, du bébé à la retraitée, c'est un génocide", dit-il.
Source: www.ntv.de